top of page

Le Pari Perdu de Trump.

  • Photo du rédacteur: AJC Patrimoine
    AJC Patrimoine
  • 22 avr.
  • 5 min de lecture



( Un article écrit par Aymeric Lang de notre partenaire Erasmus Gestion )


Trump (ou du moins ses plus proches conseillers) avait un plan. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que tout ne s’est pas déroulé comme prévu. Les multiples volte-face des derniers jours ont sérieusement entamé sa crédibilité et, peut-être de manière plus inquiétante, celle des États-Unis. Pendant ce temps, ses atermoiements impactent déjà, de manière très concrète, l’économie réelle.



Le plan de Trump


Difficile de cerner précisément les contours du plan que le locataire de la Maison-Blanche avait imaginé. Mais les grandes lignes du constat étaient les suivantes :


·    Les États-Unis présentent un déficit public abyssal : 1 900 milliards de dollars par an, soit près de 7 % du PIB, avec une tendance à l’accélération que même le département Doge d’Elon Musk ne parviendrait pas à enrayer.


·    Le niveau d’endettement américain est colossal : environ 125 % du PIB. Plus problématique encore, le « mur de la dette » approche, avec 7 000 milliards de dollars à refinancer en 2025, un record.


·    Ce refinancement s’annonce périlleux pour les finances publiques : sur ces 7 000 milliards, 5 000 milliards concernent des dettes à long terme, assorties d’un taux moyen de 2,8 %, bien inférieur au taux à 10 ans actuel, autour de 4,3 %. L’impact serait de près de 100 milliards de dollars par an en charges d’intérêts supplémentaires.


·    La Fed aggrave le problème : elle est en phase de réduction de bilan (Quantitative Tightening) et a stoppé ses baisses de taux, en raison de la résilience de l’économie et de l’inflation.


·    Enfin, le dollar est trop élevé, ce qui pénalise les exportateurs américains.


Sa solution : les tarifs (ou droits de douane), que Trump qualifie de « plus beau mot du dictionnaire ».


Ils présentent plusieurs avantages à ses yeux :


·    Ils contrarient l’Union européenne, des alliés peu appréciés de Trump.


·    Ils permettent de cibler très précisément la Chine, seul rival des États-Unis.


·    Ils accélèrent la réindustrialisation américaine, fournissant du travail à son électorat.


·    Ils génèrent des recettes fiscales, permettant de réduire partiellement le déficit, mais surtout de financer des baisses d’impôts avant les élections de mi-mandat.


·    Ils auront un impact à court terme sur l’économie, contraignant la Fed à réagir.


·    Ils servent de levier dans des négociations bilatérales : des pays étrangers pourraient accepter une baisse du dollar ou acheter de la dette quasi perpétuelle américaine (à 100 ans et à taux faible), s’ils souhaitent conserver l’accès au marché américain (les fameux accords de Mar-a-Lago).


Dans l’esprit de l'administration Trump, si tout se passe comme prévu, les États-Unis :


·    se réindustrialisent,


·    deviennent autosuffisants,


·    profitent d’un dollar plus faible pour exporter,


·    résolvent leur problème d’endettement, grâce à une Fed accommodante et à l’émission de dettes quasi perpétuelles.


Mais tout ne s’est pas déroulé comme prévu.


"Quelques" accrocs


Avec ce plan, Trump oublie plusieurs principes fondamentaux.

Certains relèvent de la théorie économique (comme les avantages comparatifs de Ricardo), d’autres sont plus pragmatiques (on ne déplace pas une chaîne de production d’Asie aux États-Unis en une semaine).


Les marchés actions ont été, comme souvent, les premiers à chuter : le Russell 2000 et le Nasdaq sont entrés en bear market (baisse de plus de 20 % par rapport aux plus hauts).


Drawdown du Nasdaq sur 10 ans




Trump s’y attendait, et cela ne semblait pas l’inquiéter, contrairement à son premier mandat. 


Ses yeux étaient rivés sur le marché obligataire. Et c’est là que le bât a blessé.Les signes de faiblesse se sont multipliés :


·    Les taux à 10 ans, qui avaient initialement baissé à l’annonce des tarifs comme Trump le souhaitait, sont repartis à la hausse la semaine dernière, dépassant les 4,50 %. Pourquoi ?


·    Perte de confiance dans les États-Unis,

·    Inquiétudes sur les dérives budgétaires,

·    Ventes massives de dette américaine, notamment par la Chine.



Taux 10 ans en forte hausse pour les Etats-Unis



·    Une adjudication (émission de dette obligataire) s’est mal passée, faute d’intérêt des investisseurs.


·    Malgré la hausse des taux, le dollar s’est effondré : il est passé de 1,08 à 1,15 face à l’EUR en quelques jours, perdant son statut de valeur refuge. Cette baisse était souhaitée, mais pas pour ces raisons, ni de manière aussi brutale.

 

Son plan, censé faire baisser les taux, forcer la Fed à agir et amener ses partenaires à céder, a échoué.


Résultat ?


Trump capitule. 

Il annonce une trêve de 90 jours et abaisse les droits de douane à 10 % pour tous les pays sauf la Chine, qui reste frappée d’un risible 145 %.

Les marchés flambent, avec la troisième meilleure séance boursière de l’histoire du Nasdaq.




Le Nasdaq en forte hausse durant la séance du 9 avril 2025



Des impacts bien réels sur l’économie et la confiance

 

Difficile cependant de céder à l’euphorie. Les droits de douane moyens sont passés de 2,5 % avant l’arrivée de Trump à plus de 20 % (avant de probables baisses à venir). D’ailleurs, après le rebond massif, les marchés ont plutôt consolidé.


Qu’on le veuille ou non, un droit de douane, c’est avant tout un impôt — largement supporté par les citoyens. Et pour citer l’adage simplificateur de la courbe de Laffer : « Trop d’impôts tuent l’impôt. »



 Petit calcul de coin de table :


1. Les importations représentent environ 10 % du PIB américain.

2. Des droits de douane de 20 % sur ces importations équivalent à un impôt supplémentaire de 2 %.

3. Le multiplicateur fiscal négatif est estimé à environ 0,7.

4. Donc 2 % x 0,7 = 1,4 % de PIB en moins.


Sachant que la croissance du PIB attendue en 2025 était légèrement au-dessus de 2 %, la marge de manœuvre est mince.

 

De façon plus concrète, quelques éléments qui montrent l’impact déjà bien réel de ces droits de douane :

 

·    La probabilité de récession est passée de 23 % en janvier à 45 % aujourd’hui.


·    La Chine a suspendu ses exportations de terres rares, essentielles à plusieurs industries de pointe — une arme qu’elle n’avait pas utilisée en 2019 malgré les tensions.


·    Nvidia a évalué à 5,5 milliards de dollars l’impact des restrictions liées à la Chine.


·    Les réservations de transport maritime par conteneurs ont chuté de 49 % au niveau mondial la semaine dernière.


·    Les anticipations d’inflation des consommateurs à un an, excellent indicateur de la consommation future, sont remontées à 6 %.




  La confiance des consommateurs américains est au plus bas.




Et maintenant ?

 

Quelques nouveaux droits de douane, probablement. Trump a annoncé des commissions d’enquête sur les secteurs pharmaceutique et des semi-conducteurs — souvent la première étape avant l’instauration de tarifs.


En parallèle, les exemptions (automobile, tech, etc.) se multiplient et devraient continuer.


Difficile de prédire la suite. Le scénario qui fait actuellement consensus prévoit un atterrissage autour de 15 % de droits de douane en moyenne, accompagné d’un ralentissement économique mondial.


Dans tous les cas, la Chine semble décidée à aller aussi loin que nécessaire pour faire plier Trump.


Même la Fed a rappelé son indépendance (du moins pour l’instant) : Jerome Powell estime que les conditions ne sont pas réunies pour une nouvelle baisse des taux.


Trump est un homme de télévision, profondément attaché à son image. Le portrait de négociateur implacable qu’il s’est efforcé de construire depuis des décennies vient d’être sérieusement terni. Mais il faut toujours se méfier d’un animal blessé.

 
 
 

Posts récents

Voir tout
Loi de finance pour 2025

Retour sur deux principales mesures qui affectent nos clients par notre partenaire UAF Life. Création de la contribution différentielle...

 
 
 

Comentários


bottom of page